La Splendeur Actes Sud
Dit par l’auteur
La Splendeur (roman, Actes Sud, 2014)
La Splendeur s’invite sur le plateau de La Grande Librairie, une émission de François Busnel.
Je serais ravie de vous retrouver le jeudi 29 mai à 20h35, sur France 5.
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L’avis de l’éditeur
Tout à la fois roman biographique et méditation sur les mystères du génie créateur, La Splendeur est le récit de la vie de Girolamo Cardano (1501-1576), célèbre médecin, astrologue, savant, mathématicien et inventeur qui évolua aux côtés des plus grands, de Charles Quint à Ambroise Paré.
En 1501, l’Italie est la patrie de l’homme et l’épicentre d’une renaissance flamboyante qui trouve là son apogée aussi bien spirituel que scientifique. Sous ces auspices naît, fils illégitime d’un docte mathématicien qui fut l’ami de Léonard de Vinci, Girolamo Cardano, enfant prodige qui fait preuve d’une précocité extraordinaire et semblera, sa vie durant, habité par un impénétrable génie.
Grand esprit ayant traversé le XVIe siècle, prototype de l’humaniste et de l’esprit libre, cet “écorché du cerveau” est au cœur d’une bio-fiction qui plonge dans la pensée extraordinaire d’un siècle déchiré entre rationalité et fascination à l’égard des forces occultes. Tout à la fois savant reconnu et mage mystique, Cardano attira sur lui les foudres de l’Inquisition et se vit condamner pour hérésie, avant de trouver protection auprès du pape Pie V, à Rome, où il acheva son existence.
Féru de rêves et de songes prophétiques, Cardano prétendait posséder son propre “démon” personnel, qui lui soufflait amoureusement à l’oreille traités mathématiques et prédictions astrologiques. C’est ce démon qui prend en charge le récit, renouvelant ainsi avec audace le genre biographique, lui conférant la profondeur et la vérité qu’en ses détours, seule la fiction, bien souvent, fait surgir. Instance malicieuse, créature aérienne douée de pouvoirs surnaturels, génie tutélaire, messager des astres qui aide le divin à organiser le monde, le bon génie de Cardano veille sur sa destinée et en fait avec éclat le récit, incarnant l’étrangeté et le mystère qui entourent la radicalité, la fulgurance de l’inspiration.
La Splendeur raconte la difficile ascension de cet homme hors du commun, puis sa chute, en partie causée par ses deux fils (l’aîné, exécuté pour meurtre ; le cadet cambriolant son père puis le dénonçant à l’Inquisition pour avoir établi l’horoscope du Christ). Instable, joueur, masochiste, orgueilleux, fantasque, imprévisible, halluciné, esprit si original qu’on l’a tenu pour fou, Cardano évolue aux côtés des plus grands (Charles Quint, le vainqueur de l’Italie ; André Vésale, l’anatomiste ; Ambroise Paré, le chirurgien des champs de bataille). Quant à Cardano l’humaniste, il a soigné des sorcières aussi bien que des cardinaux. Son esprit libre a inspiré les libertins du XVIIe siècle (Charron, Gassendi, Cyrano de Bergerac). Il a agacé et fasciné Pierre Bayle, Rousseau, Diderot et son Encyclopédie, pour avoir rédigé, dans un latin obscur, une autobiographie aussi invraisemblable et hâbleuse que celle de Benvenuto Cellini. Gérard de Nerval et le Louis Lambert de Balzac lui sont redevables. Valéry l’a porté aux nues pour avoir mis plus haut que tout les vertus de l’entendement et de l’intelligence.
Avec ce roman qui plonge dans la pensée extraordinaire du xvie siècle, à la fois rationnelle, soucieuse de sauver l’homme, et avide de forces occultes, pour explorer ce que Cardano appelait la “splendeur”, une sorte d’état lumineux, second, de sortie de soi, durant lequel il écrivait en extase, Régine Detambel fait le portrait d’un esprit incandescent. Conjuguant fantaisie et imagination, ce récit virtuose et flamboyant emprunte au baroque pour célébrer le triomphe de l’esprit et du génie, et rendre un hommage jubilatoire aux extases de la pensée en mouvement, de ses ardeurs les plus fécondes à ses plus folles fantasmagories.
Régine Detambel vit aujourd’hui dans la région de Montpellier et est l’auteur depuis 1990 d’une œuvre littéraire de tout premier plan, publiée pour l’essentiel chez Julliard, au Seuil et chez Gallimard. Chevalier des Arts et des Lettres, Régine Detambel a également été lauréate du prix Anna de Noailles de l’Académie française.
Chez Actes Sud, elle est l’auteur du Syndrome de Diogène, éloge des vieillesses (2008) et de deux autres romans : Son corps extrême (2011) et Opéra sérieux (2012).
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L’avis de l’auteur
Par-dessus tout, l’envie d’interroger ce qui me fait écrire, qu’on appelle parfois encore l’inspiration, qui a ici un visage : maintenant j’en suis sûre, c’est le daimôn qui nous pousse à créer, cet étranger en nous, si changeant, tour à tour candide et ténébreux, parfois lumineux et parfois dépravé. On sent bien qu’il existe et alors on n’est plus maître de ses chemins d’écriture.
Je me suis surtout régalée avec un personnage hors du commun dans une époque hors du commun, grouillant de tout ce qui nous fait frétiller aujourd’hui, quel que soit notre âge : les sortilèges et les poisons, les sorcières et les miracles, les destinées invraisemblables et les cursus inouïs !
Cardano était loufoque, fantasque, imprévisible. S’il s’appliqua surtout aux mathématiques et à la médecine, cela n’a pas empêché son côté prophète et magicien, il fut même le type accompli de cette étrange confusion de rigueur scientifique et de fantasmagorie, si courante chez les intellectuels européens de la Renaissance. Sans cela sa vie n’aurait pas eu cet intérêt presque tragique.
Sa belle biographie, raillée par Diderot et Rousseau qui rêvaient d’un modèle d’homme carrément moins cinglé, m’a entraînée bien au-delà des romans que j’avais lentement domestiqués depuis plus de vingt ans. La Splendeur pourrait bien être ma première liberté romanesque, car je considère ce livre comme une incursion dans une zone de pure énergie. J’ai vraiment tout consenti à ce roman, lui ai tout abandonné — comme Cardano à son daimôn —, lui ai cédé tout ce qu’il me demandait, même le plus déraisonnable, le plus capricieux…
Disons que Cardano coiffé de son daimôn est la personnification de cette nouvelle énergie romanesque !
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La presse
L’Humanité, 9 janvier 2014
« Régine Detambel, dans son dernier roman, évoque en profondeur la figure du savant italien du XVIe siècle qui flirta avec le démon sans oublier la raison… ». (Muriel Steinmetz)
Le Soir de Bruxelles, 2 février 2014
« C’est à la fois savant et guilleret, apocryphe et anachronique. Un joyau rare. » (Pierre Maury)
Le Livre du jour sur France Info, 15 février 2014
« Girolamo Cardano fut à la fois médecin, savant, mathématicien et astrologue. Cet homme, qui a vécu entre rationalité et mystère, est merveilleusement restitué dans ce livre intitulé La Splendeur. » (Philippe Vallet)
Le Quotidien du médecin, 24 février 2014
« Un décapant roman biographique, baroque et jubilatoire. » (Martine Freneuil)
Le Progrès, 21 février 2014
« Un livre à ne pas manquer. »
Page des Libraires, 28 février 2014
« Captivant ! » (Sarah Gastel, Librairie Terre des livres à Lyon)
L’Express, 19 mars 2014
« Avouons-le, le destin de cet hurluberlu fantasque fait du bien a une époque, la nôtre, qui cherche en vain ses héros. » (François Busnel)
Plume Magazine, avril 2014
« Voici une belle méditation sur la création et sur le génie. » (Patrick Poivre d’Arvor)
Salon-Littéraire.com, juin 2014
« La voici cette beauté, exprimée dans la splendeur des mots comme un avant-goût de la beauté incontestable de ce roman surprenant… » (Dan Burcea)
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Extrait
« Sa première détention dans les geôles de l’Inquisition avait duré soixante-dix-sept jours, la seconde chez lui quatre-vingt-six jours, en tout cent soixante-trois jours de résidence surveillée. Quand la consigne fut levée et qu’il put enfin sortir de chez lui, Cardano s’aperçut sans peine qu’il ne pouvait plus vivre à Bologne et vers la fin de septembre 1571 il partit pour Rome. L’ancien suspect allait se mettre à l’ombre du Vatican.
Le 7 octobre 1571, au moment même où don Juan d’Autriche détruit la flotte turque à Lépante, il arrive dans la Ville Éternelle et va loger non loin de la piazza del Popolo. Il n’est plus question pour lui d’enseigner. Il joue au médecin des riches. Il entre dans des chambres damassées. Par son flot habituel de paroles enjouées et bourrues, il rassure des cancéreux couchés sur des lits brodés d’or. Les soupçons des inquisiteurs n’ont pas entamé sa réputation, au contraire, et la clientèle ne manque pas : de nobles matrones, des jurisconsultes se félicitent de ses soins. On l’accepte partout, il a manifestement trop d’argent à présent pour que l’on continue de le tenir à l’écart ou même de lui chercher sérieusement des poux dans la tête. Il a maintenant un intendant, le fils même du sergent qui l’avait mis aux fers l’année précédente. Il encaisse des honoraires pharamineux, achète une carriole, fait le délicat et s’enquiert d’abord de la qualité de ceux qui désirent le consulter.
Il a de hauts protecteurs, des amis influents. On cite les cardinaux Borromeo et Allia, sans préjudice d’un certain prince de Matelica dont il fait l’éloge enthousiaste. Ce Matelica a dû être bien généreux pour le vieux Cardano plein d’années.
Le vent du bûcher l’a rendu flatteur. Entouré d’êtres si nobles il ne pense plus jamais à moi. Maintenant c’est pour eux qu’il écrit. Pour leurs beaux yeux. Il raffole des stylets pour lesquels il a dépensé plus de vingt écus d’or, sans compter les plumes. Deux cents écus ne suffiraient pas à payer son écritoire. Il leur doit maintenant du travail d’encre en échange de leurs lingots. Malgré ses belles plumes, le voilà plutôt sec. C’est-à-dire qu’écrire est un peu plus compliqué, je pense, que de rembourser lustres, meubles d’acajou et tapis.
Les nuits s’allongent et le froid est arrivé. Cardano observe jour après jour la déchéance des arbres autour de sa fenêtre, se réveille dans un monde écarlate avec un soleil énorme. Ombres d’oiseaux en diagonale sur le mur. Blotti dans ses couvertures, il renifle une brise molle chargée d’eau et coupée de fumée. Il attend. De ces journées sanguinolentes d’octobre, il scrute, les nerfs tendus, félin, très à l’affût, tout ce qui pourrait faire naître une page nouvelle… »
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Radio Télévision Suisse, Espace 2 – Entre les lignes, 8 janvier 2014
Entretiens autour de La Splendeur, par Anik Schuin
Lectures d’extraits par Mathias Glayre
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L’Humanité, 9 janvier 2014
La vie et l’œuvre au noir de Jérôme Cardan, par Muriel Steinmetz
Régine Detambel, dans son dernier roman, évoque en profondeur la figure du savant italien du XVIe siècle qui flirta avec le démon sans oublier la raison.
« Régine Detambel joue cette fois le jeu de la biographie historique en attaquant de biais le vif du sujet. Il s’agit de la vie de l’illustre médecin, astrologue, savant, mathématicien et inventeur Girolamo Cardano (1501-1576), connu en France sous le nom de Jérôme Cardan, qui inspira les libertins du XVIIe siècle, intrigua les encyclopédistes puis suscita l’intérêt de Balzac, de Nerval et de Valéry… Pour mener à bien son étude, la romancière se met dans la peau du démon personnel de son héros, lequel aurait prétendu que ses découvertes lui étaient soufflées par la voix de ce « divin pourvoyeur des hommes nés au deuxième jour de Vénus en Balance ». L’astrologie tient en effet une place prépondérante dans l’imaginaire de ces temps reculés.
Quand jaillit l’inspiration
Les règles du roman biographique sont singulièrement bousculées puisque le récit, aux accents magiques et torturés, est d’emblée confié à une tierce personne sombre, un démon qui semble frissonner au plus près de celui qu’il a investi, voire même respirer et « battre » à ses tempes. Ce démon, somme toute modeste, affirme d’emblée ceci : « J’ai quelque influence sur le jeu, mais très peu sur les dés. »
Grâce à ce subterfuge, Régine Detambel explore, comme du dedans, les visions qui assaillent Girolamo Cardano, sa vive passion pour les nombres, la force qui le pousse à se tuer à la tâche et à noircir à la suite une bonne douzaine de feuillets pour « plier la langue, comme les femmes des draps, sous le feu du fer, dans la même vapeur irrespirable. » La romancière observe de main de maître l’instant d’ébullition où l’inspiration explose. « Ces explosions de pensée, écrit-elle, Girolamo les nomme splendeur. » Un mot qu’elle donne pour titre à son roman.
Cardano, génie précoce au savoir encyclopédique, aura compilé, sa vie durant, presque tous les auteurs grecs et latins. « Il préférera toujours obstinément le livre à la chair », écrit Régine Detambel, à un point tel que, lors de ses déplacements à cheval ou à dos de mulet, il lit encore ! Il a aussi donné sa formule de l’équation du troisième degré. Lorsque la romancière plonge son lecteur au cœur de l’univers flamboyant des mathématiques et de la science de la Renaissance italienne, période écartelée entre la raison et la fascination pour les forces occultes, on sent poindre une affinité avec les nombres comme chez de nombreux membres de l’Oulipo (un état d’esprit qui fut, entre autres, celui de Queneau et de Perec). Cardano est à cet égard l’exemple idéal d’une époque de recherches effrénées.
Matérialiste, adepte de Lucrèce, mais aussi astrologue, ayant établi l’horoscope de Jésus, natif du Capricorne ! (ce qui vaut à l’astrologue impénitent un procès devant l’Inquisition), il sera aussi et avant tout un « toubib » fou de dissection, comme le fut Léonard de Vinci et pas mal d’autres à l’époque.
Les guerres d’Italie, qui occupent l’arrière-plan du livre, n’apportent-elles pas leur lot de cadavres frais aux carabins désireux de percer les mystères de l’organisme humain ? Le corps ouvert, scruté dans ses moindres recoins, n’est-il pas au fond le héros secret de ce livre ?
Romancière confirmée, kinésithérapeute de formation, Régine Detambel connaît par cœur le territoire interne de l’homme. Voici une épopée clinique et biographique à travers la vie d’un savant de son temps, recréée avec une force non dénuée d’extravagance, par une main experte en écriture qui laisse délibérément de côté tout ce qui a trait à la plate psychologie ; éléments peu familiers d’un temps où la brutalité régnait déjà sans partage. » © Muriel Steinmetz
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Le Clavier cannibale
Sans cesse à ses côtés s’agite le démon : Detambel au scalpel, par Claro
« Que faire d’un esprit du XVIème siècle, par ailleurs philosophe, astrologue, inventeur et médecin italien ? Qu’en faire sans tomber dans d’ineptes fresques historiques, égarer le lecteur en doctes analyses, piétiner dans le purin psychologique ? A ces questions, Régine Detambel apporte sa réponse rebelle et rocailleuse, déjouant tous les pièges du roman-oraison, faisant de son sujet – l’atypique Girolamo Cardano – ni un esprit sublime ni un roublard invétéré (même s’il fût un peu des deux, apparemment) mais un homme habité par un démon.
Un démon? Oui, et c’est d’ailleurs Cardano qui le dit lui-même, se prétendant habité par un génie familier, qui lui ouvre l’esprit, lui parle par les rêves, le sauve in extremis, bref, veille sur lui comme jamais le siècle – feu, sang, superstition – n’aura su ni souhaité le faire. Qu’à cela ne tienne, donc, ce démon-seringue sera le narrateur de ce livre galvanisé, et en optant pour ce point de vue trouble et machiavélique, Régine Detambel permet à son roman – La Splendeur – de traiter, comme un minerai possiblement noble mais pétri d’impuretés, la vie peu commune et parsemée de drames de cet homme avide de connaissances jusqu’à l’excès, gouverné par sa soif d’apprendre et d’exposer, rongé par la manie d’écrire, ballotté par des rêves prémonitoires, humaniste de la première trempe qui traverse, en fulgurance aheurtée, plus de soixante-dix années d’obscurités.
Le démon de Detambel est tour à tour aiguilleur d’âmes, bonimenteur, contempteur des lois et grand trafiquant du sort. Un démiurge aux petits et grands soins pour son pathétique génie d’homme – et quelques autres, aussi. Et le moins qu’on puisse dire, c’est qu’il a du pain sur la planche :
« Ils sont innombrables, mes hommes. Sur la terre comme au ciel, ça commence à chiffrer. A force les wagons du ciel en sont pleins, escaladant, dégringolant les échelles de la Création, dans de grands jets de vapeur. La seule différence avec un élevage de poulets, c’est qu’une âme prend encore moins de place. »
Traversant les âges, en inlassable météore, il n’a ni illusions ni remords, son seul souci est de conduire tel ou tel homme jusqu’à son dernier souffle, en lui évitant non les malheurs mais une mort prématurée, comme si les hommes étaient d’indécrottables nouveau-nés qu’il faut mener à terme, au terme de leur trajectoire, et veiller sans cesse à ce qu’ils ne s’étranglent pas avec le cordon de l’imprudence. Alors, pour décrire les errements et lueurs du sieur Cardano, Detambel offre à ce démon une langue musculeuse et scintillante, une langue attentive au goût et à la couleur des humeurs, dépouillée de toutes afféteries, à la fois décomplexée et tenue, aussi souple qu’elle est incisive : car son démon, non content de repêcher régulièrement Cardano, ne nous épargne rien de ce siècle où « tuer, guérir, découvrir, observer, classifier sont les grandes marottes », ce siècle seizième où
« On est puceux, chassieux, transi, mais tout de même on peint, on sculpte, on pense, on traduit, le monde circule, prolifère et transpire, on décharge chaque matin dans les rues de Pavie assez de matériau pour rebâtir une ville entière, le soleil ne se fatigue jamais, la peste non plus, les chars funèbres non plus, les hommes non plus, le lendemain ils sont de nouveau à leur poste, ils flambent sur le bûcher, ils prient, ils déchargent de grandes plaques de plomb, ils tissent le chanvre, des cordes et des câbles s’enroulent et se déroulent, ça sent la sueur, sur les échafaudages travaillent une multitude de scieurs et de charpentiers […]. »
Furioso mais méthodique, épris de frénésie mais ne lâchant jamais sa proie, La Splendeur – qui nous délecte du cambouis humain grâce au bagout incantatoire de ce démon qui n’oublie jamais qu’il s’adresse aux frères humains qui avec lui vivront – peint, avec les couleurs de la répulsion et du magnétisme, le portrait craché – comme on dit « soleil craché » – d’un siècle dévoré à mesures égales par la superstition et les équations, un siècle dont l’indécidable Girolamo Cardano est ici le toton à la fois magnifié et chahuté. »
© Claro, Le Clavier cannibale
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Le roman est un espace de liberté
par Bertrand Leclair
« Chère Régine Detambel,
La Splendeur est un livre puissant, à l’énergie joyeuse, et vous frayez dans la langue commune avec les étincelles et le rythme du casseur de pierres ignorant la fatigue ; le texte vole en éclats pour laisser paraître le visage mobile d’un savant qui est un homme fort de toutes ses faiblesses, qui s’incarne dans une quête et des superstitions qui sont toujours les nôtres, en partage. C’est très beau, d’autant que le choix d’un narrateur à sa façon si particulière omniscient emporte l’adhésion ; votre démon habite le livre comme l’idée même d’une voix littéraire.
Si le roman est d’abord et avant tout, comme je le pense, un espace de liberté, de jeu au sens le plus fort du terme, alors le vôtre est une vraie réussite.
Dans le paysage contemporain assez atone, j’avais très envie de vous le dire, serait-ce de ce petit signe à distance. » © Bertrand Leclair
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Le Soir de Bruxelles, 2 février 2014
« Pas besoin de connaître Girolamo Cardano, génie polyvalent du XVIe siècle italien, pour être fasciné par la manière dont Régine Detambel raconte sa biographie. Elle l’empoigne, lui fait rendre tous ses sucs, l’apostrophe par l’intermédiaire d’un dieu qui veille sur lui, dessine des horoscopes et affronte l’Inquisition, non sans avoir soigné au passage toutes les maladies connues et inconnues. C’est à la fois savant et guilleret, apocryphe et anachronique. Un joyau rare. » © Pierre Maury
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France Info, 15 février 2014
Le Livre du jour, par Philippe Vallet
« Girolamo Cardano fut à la fois médecin, savant, mathématicien et astrologue. Cet homme, qui a vécu entre rationalité et mystère, est merveilleusement restitué dans ce livre intitulé La Splendeur. »
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Le Quotidien du médecin, 24 février 2014
Médecins et malades sur le devant/divan, par Martine Freneuil
« Kinésithérapeute de formation, Régine Detambel nous invite à une incursion dans la médecine de la Renaissance et à une réflexion sur le génie créateur. La Splendeur est l’histoire de Girolamo Cardano, célèbre médecin, astrologue et mathématicien italien qui a traversé le XVI siècle entre rationalité et mystère, en côtoyant les plus grands, de Charles Quint à Ambroise Paré, et dont la vie familiale fut aussi grevée de chagrins et d’adversités que son esprit fut léger et libre. Comme il prétendait être habité par un « démon », une sorte de bon génie qui le mettait sur le chemin des chiffres et des astres, c’est à ce génie que l’auteure prête sa plume. Il en résulte un décapant roman biographique, baroque et jubilatoire. »
© Martine Freneuil
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Page des Libraires, 28 février 2014
Lu et conseillé par la Librairie Terre des livres à Lyon
« Se déroulant dans un XVIe siècle qui oscille entre raison et fascination pour les forces occultes, où l’espérance de vie est de vingt ans et des poussières, La Splendeur dresse le portrait d’un savant à l’imagination souveraine et à l’irrésistible esprit d’inventivité. Ce savant a réellement existé, il s’appelait Girolamo Cardano. Médecin reconnu, mathématicien, astrologue et légiste, il est le modèle même de l’humaniste dévoré de curiosité, accueillant aussi bien la possibilité de l’existence des licornes que maniant les équations. Girolamo possède même un génie familier, qui, à la nuit tombée, lui souffle amoureusement des savoirs multiples ! À travers le portrait de ce personnage hors du commun évoluant dans une époque hors du commun, Régine Detambel plonge avec érudition et malice à l’intérieur du contexte historique et culturel de la Renaissance italienne.
Ce roman biographique à l’écriture foisonnante et brute fait revivre avec panache l’effervescence, parfois violente, propre à cette époque. On sourit, on apprend des tas de choses passionnantes et notre enthousiasme est total dès lors que nous nous rendons compte que le récit de la vie de Girolamo est raconté par son espiègle démon, figure du mystère du génie créateur. Captivant ! »
© Sarah Gastel
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L’Express, 19 mars 2014
Le Livre, par François Busnel
« HEROS RENAISSANT. Régine Detambel sort de l’oubli Girolamo Cardano, savant, astrologue et… flambeur.
Le romancier comme l’historien jette des torches dans l’abîme II contribue ainsi à combattre l’un des plus terribles maux de l’existence, l’oubli C’est en romancière que Régine Detambel raconte la vie de l’un des esprits les plus libres d’une epoque admirable, la Renaissance. Qui se souvient de Girolamo Cardano ? On lui doit pourtant la résolution des équations du troisième degré (acquise au terme d’une aventure qui relève autant de la mystification que du plagiat, mais cela aussi fait partie de l’histoire des grandes découvertes). II inspira les libertins du XVIe siècle, intrigua Pascal et Rousseau, fut chanté par Nerval, Balzac, PaulValéry. Puis tomba dans l’oubli. Cardano est pourtant un symbole. II incarne à merveille l’homme de la Renaissance converti aux lumières de la raison (il fut mathématicien mais aussi médecin) et adepte de l’occultisme (astrologue, il lisait l’avenir et fit a quelques puissants de funestes prédictions). Régine Detambel pose parfaitement le contexte : la Renaissance est l’âge des extrêmes. D’un côté on guérit (avec Ambroise Paré), on observe (songeons à Kepler et aux astronomes), on cartographie (depuis les voyages de Colomb), on poétise (ah, les poètes de la Pléiade !) De l’autre, on massacre, on pille, on opprime, on laisse peste et choléra décimer les populations (l’occupation de l’Italie par les armées françaises, notamment, n’eut pas seulement pour conséquence le rapt de charmants tableaux et de peintres de génie). Science et magie font bon ménage et Cardano illustre ce merveilleux paradoxe. Régine Detambel donne la parole au démon de Cardano. Une sorte d’ange négatif autant que la voix de l’inspiration. Et voici donc la biographie du grand médecin (qui s’évanouissait à la moindre goutte de sang), déroulée par son (mauvais) ange gardien. Où l’on apprend que le grand homme fut aussi un flambeur, joueur impénitent, mari peu enflammé, père malheureux. Cardano navigua à vue dans la tempête qui accompagna l’essor des sciences et dont le nom fait encore trembler : Inquisition. Son fils aîné fut décapité en place publique pour avoir trucidé femme et enfant au cours d’une scène de ménage. Son cadet le dénonça quelque temps plus tard et le fit jeter en prison. Avouons-le, le destin de cet hurluberlu fantasque fait du bien à une époque, la nôtre, qui cherche en vain ses héros. »
© François Busnel
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Magazine Plume, avril-juin 2014
Plumes de femmes, par Patrick Poivre d’Arvor
« … voici une belle méditation sur la création et sur le génie. Elle est signé Régine Detambel et s’intitule majestueusement La Splendeur. Il s’agit de la biographie très romancée d’un médecin que je ne connaissais que de nom. Girolamo Cardano (que l’on appelait Jérôme Cardan dans la France du XVIe siècle). Il ne se contentait pas de soigner, comme son contemporain Ambroise Paré, il était aussi savant, astrologue, mathématicien. Cela n’aurait pas suffi à exciter l’imagination de Régine Detambel. L’homme était aussi pétri d’ésotérisme. Il adorait analyser ses propres rêves et en tirer des prédictions prophétiques qui faisaient l’admiration de ceux qui le côtoyaient. Cela lui valut plusieurs séjours dans les geôles de l’Inquisition puis une réputation qui toucha au XVIIe les libertins, au XVIIIe les encyclopédistes, au XIXe les grands romantiques comme Nerval et au XXe Paul Valéry. Il avait prédit qu’il mourrait à 45 ans, puis à 72. Il s’est trompé sur ce point-là, qui n’est pas médiocre : il a vécu trois quarts de siècle tout juste. Et aujourd’hui, grâce à Régine Detambel, il a une deuxième vie. »
© Patrick Poivre d’Arvor
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Revue Europe, avril 2014
Note de lecture, par Bernard Fournier
« Quelle énergie, quelle vigueur et quelle splendeur que ce petit roman sur le foisonnement intellectuel du seizième siècle en Italie du nord ! Régine Detambel écrit avec une force dynamique telle qu’on ne s’aperçoit presque pas de sa grande érudition. Et pourtant, quelle somme de travail il a fallu pour faire remonter à la mémoire ce Jérôme Cardan (inventeur du joint de transmission, par exemple) aussi quelle vitalité il faut pour faire revivre sous les yeux d’un lecteur du vingt et unième siècle des controverses, tant sur l’hérésie que sur les équations au troisième voire au quatrième degré. Ce tour de force est rendu possible grâce à une écriture rapide et colorée : « On confie les cas litigieux à ses rasoirs, des empoisonnés d’une pâleur fantomatique à ses bistouris, des nourrissons moins longs que des lièvres à ses crochets, à ses sondes, à ses scies, à ses tarières, à ses maillets, à ses aiguilles. » Et parfois on dirait qu’elle se pique elle-même au jeu de se comparer à ces humanistes du siècle des Lumières italiennes ; ainsi ces longues listes à la Rabelais. L’auteur est ainsi tenté par l’humour grinçant quand elle examine par le menu une trépanation : « comme un trou à la place de la bouche, qui pourtant n’est qu’un trou », et parlant des méninges, : « Il enfonce ses doigts gourmands dans la substance gluante ». Avec cette ironie parfois macabre et qui fait feu de tout bois, on ne ressent aucun malaise, même, au contraire, une certaine jubilation de lecture, tant souvent le texte en dit plus que le simple déroulé d’une vie. Ajouté à cela l’auteur ne se prive pas d’aller-retour avec notre époque avec des mots ou des références (« On n’est pas dans un film américain ») ou des jurons, ce qui augmente la distance en favorisant le rire. Enfin, et c’est sans doute le biais le plus intéressant de ce livre, c’est la distance prise avec le sujet, grâce au subterfuge d’écriture qui consiste à faire parler le personnage du diable, qui vient au secours de l’inventeur, en feignant de tirer les ficelles. Double distance encore que cette intervention même de l’auteur au début de chaque chapitre, comme des extraits de journal intime : « jamais l’activité de ma pensée ne m’a rendu un seul jour malheureux ». En définitive, Régine Detambel, et de quelle belle manière à travers l’évocation de cette vie, nous emmène joyeusement dans un voyage vers l’universalité. »
© Bernard Fournier
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Salon-littéraire.com, juin 2014
Dans le livre, pas de mort, par Dan Burcea
« Reconnaître à l’objet livre l’existence d’une matérialité sensible, capable de prendre vie dans l’intimité d’un mystérieux dialogue, tel est le défi qu’assume Régine Detambel, romancière et bibliothérapeute, pour qui «de la peau au papier il n’y a qu’un pas[1]». Cette corporalité vivante n’est sans doute pas réduite, chez cette écrivaine qui fait l’éloge du «corps extrême», à un simple échange sensoriel, au contraire, elle prend l’apparence d’une symbiose où écrivain, livre et lecteur sont appelés à communiquer jusqu’à en souffrir ensemble. Mieux encore, nous pourrions parler d’un processus dans lequel l’écriture cesse d’être une délectation, prend la forme d’un dur labeur et conduit l’écrivain à se fondre dans la matière jusque-là inerte du matériau de l’écriture. Dans un mimétisme parfait, plume, parchemin, table rompent les barrières qui les séparent de la main du maître qui devient à son tour matérialité souffrante: «Girolamo lui-même est un parchemin jaune, avec des rides comme des coups de couteau sur la nuque. Des taches brunes marquent ses pommettes. Son majeur droit porte un durillon enflammé, que tannent la plume de fer et le corps hexagonal des craies».
Le personnage dont il est question ici n’est autre que le savant italien Girolamo Cardano, philosophe, mathématicien, astrologue, inventeur et médecin, figure d’exception du XVIe siècle italien, héros du dernier roman de Régine Detambel, «La Splendeur» (Actes Sud). Cet hommage adressé à la personnalité à la fois éclatante et contrastée de cet homme de génie ouvre les portes d’un passionnant voyage dans le XVIe siècle occidental où «tuer, guérir, découvrir, classifier sont les grandes marottes», et où «on peint, on sculpte, on pense, on traduit, le monde circule, prolifère et transpire» malgré la misérable condition des uns et des autres. C’est en même temps une aventure dans les sentiers secrets d’un siècle où science et omniprésence du merveilleux, du miraculeux et de la légende font bon ménage. Et qui d’autre que ce savant vivant à la frontière de la raison et de la déraison, du rêve et de la folie aurait pu mieux incarner une telle époque ?
L’homme pour qui «la splendeur» n’est que l’expression de «ce travail hallucinant, ces fulgurances, comme des navettes qui vont et qui viennent à chaque poussée du front». Lui, «le champion de la surabondance intellectuelle», l’homme qui vit à «cent hypothèses à l’heure», l’auteur d’un Abrégé de l’art de la médecine qui améliora la vie de nombreux malades, lui dont la gloire réussit peu à peu à remplacer celle d’Érasme, lui, qui réussit à élaborer la méthode de résolution des équations de troisième degré, enfin, lui, qui résolut «45 000 questions et 200 000 problèmes de moindre importance». Pour se faire une idée de l’étendue de sa personnalité, il faut lire Cardano dans son propre opus De vita propria où il affirme avec conviction : «Je représente l’extrême condition humaine et à ce titre mérite largement l’immortalité»!
Ces mérites encyclopédiques qui firent sa gloire parmi ses contemporains n’ont pas suffi à Girolamo Cardano pour devenir le sujet éminent d’une chronique encomiastique, car, même si sa renommée fut grande, le savant eut beaucoup d’ennemis, y compris parmi ses proches, pour ne pas nommer même sa progéniture. Le voici confronté à ses délires : «Il lui semble voir partout des regards ennemis, sentir l’hostilité non seulement de ses confrères mais des autorités; cauchemars, délires de la persécution, des loups rôdent dans ma chambre, aidez-moi». Rien d’étonnant puisque le siècle, en proie de ce trop-plein de surnaturel, est un terrain propice à la magie, à la divination, à toute sorte de complots, de croyances et de phobies.
Vue dans la perspective fictionnelle, l’existence d’un personnage si haut en couleurs, si contrasté, est pour Régine Detambel une incroyable aubaine. Et même, on serait bien tenté de croire qu’il suffirait pour elle de regarder juste l’imposante stature de ce personnage et de se contenter de revisiter ces pages dithyrambiques pour que leur simple reprise (re)fasse de cet homme un héros et de sa vie un roman. Sauf que, dans ce cas, son travail se résumerait à compiler des documents, incapable dès lors de rendre compte du véritable travail fictionnel qui dessine le nouveau visage de son héros. Car ce qui intéresse Régine Detambel n’est pas en fin de compte la vérité sur Girolamo Cardano, et encore moins sa vérité à elle sur son personnage. Ce qu’elle veut, et elle a bien raison de le vouloir ainsi, c’est de créer une fiction où trouve place la folie d’un homme que le siècle façonne. Son travail d’écriture n’est ici qu’une déconstruction qui s’évertue à décortiquer les liens secrets de l’existence du héros pour faire ressortir au milieu de ses contradictions son aura romanesque.
Ce travail n’a rien d’insidieux, il ne s’agit pas d’un artefact mais d’une vraie stratégie d’écriture parfaitement assumée. En effet, elle transfère les attributs du narrateur omniscient au daïmonion, au génie qui gouverne l’être secret de son héros et dont il est l’intime confident. Car Girolamo Cardano est convaincu de posséder un daïmonion, non pas dans le sens démoniaque, mais dans l’acception gréco-latine de génie personnel qui habite l’être et gère sa destinée, «aussi lourd que le démon de Socrate». Vue de cette hauteur, la narration qui émane dorénavant de la personne du daïmonion-narrateur prend une incroyable envergure qui rassure le lecteur à la fois par une cohérence narrative et par un surplus qui rompt les barrières du réel et facilite d’incessantes connivences avec le fantastique. Car, même s’il a une identité à part entière, le véritable lieu où habite ce démon est intrinsèque à l’être de Girolamo et n’a rien avec le diable. Voici l’explication du savant Cardano, dans sa plaidoirie devant le vicaire général: « Que vous apporte-t-il donc que Dieu ne vous donne pas ? Il fait une sorte d’île de mon esprit, il me donne une sensibilité incroyable, mon cerveau fourmille, mon démon est en quelque sorte une zone de mon cerveau qui sait tout et comprend tout, il peut saisir une pensée dans tous ses échos à la fois, toutes ses ramifications…»
Or, accorder la dignité auctoriale à ce daïmonion, voilà non seulement une belle astuce de la part de Régine Detambel, mais une des idées qui structure admirablement son récit. Car, au-delà de toute apparence et résistant à toutes les controverses, l’auteure semble accorder crédit à la cohabitation inéluctable de tout être avec son génie protecteur, sorte d’indubitable alter-ego qui brouille jusqu’à la confusion les pistes identitaires : «Nul homme ne sait qui il est. Nul homme ne sait s’il est son démon ou bien lui-même».
Vertigineuse mise en grade pour les sceptiques que nous sommes ! Et sérieux coup de massue à nos confortables convictions cartésiennes !
Mais faire une place de prédilection à l’imaginaire, au miraculeux pour expliquer la folie d’un homme comme Cardano ne serait pas suffisant pour construire une narration à sa mesure. Régine Detambel l’a très bien compris en choisissant cette incessante transition entre ce que nous appelions au tout début la corporalité vivante dans ce type de dialogue où il ne s’agit pas de confronter deux facettes d’une réalité mais deux réalités fondamentalement différentes.
Il est facile de représenter cette dichotomie chez Cardano par la différence entre ce qui appartient et ce qui n’appartient pas au livre – réalité ultime, indivisible. Lorsqu’il assiste à la dissection d’un cerveau, le jeune étudiant Girolamo remarque «un livre grand ouvert aux pieds du gisant ». Voici la scène : « Ce livre ouvert semble un organe détaché du corps. Ce livre ouvert attire le regard de Girolamo bien plus intensément que le corps ouvert. […] Il voit si bien dans le livre, il n’y comprend rien dans le corps, le livre est plus clair que le corps. Dans le livre, pas de mort. […] Il y aurait un secret de la vie, dans ce livre plus que dans le corps».
On pourrait donc l’affirmer, cette histoire suffit largement pour être fabuleuse et enivrante à tel point qu’elle puisse renfermer dans ses pages la splendeur si précieuse à ce savant hors pair pour qui le monde est, comme nous le disions à l’instant, un livre qui demande à se renouveler sans cesse.
Et c’est peut-être en cela même que consiste la partie la plus lumineuse de cette aventure à laquelle nous convie Régine Detambel, celle d’accepter que dans toute la folie de son héros il y a une part d’émouvante humanité et dans son délire une cohérence dont seuls les rêveurs connaissent les délices.
La voici cette beauté, exprimée dans la splendeur des mots comme un avant-goût de la beauté incontestable de ce roman surprenant: «Les mappemondes, les portulans, les bestiaires, les herbiers, tout est à refaire. Tout est à nous. Que nous manque-t-il encore, sinon de prendre possession du ciel ?»
C’est dire combien tout cela relève d’un éternel questionnement que chaque époque cultive à sa façon, mais en réalité avec la même incessante fascination.
[1] La Grande Librairie, «La valise idéale», 29.05.2014.
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